Quels sont les impacts de la réforme de la Protection Sociale Complémentaire (PSC) du secteur public pour les mutuelles historiques ?

La loi de la transformation de la fonction publique promulguée le 6 août 2019 revoit le système de complémentaire santé pour le secteur public. Impulsée par le ministère de la Transformation de la Fonction publique, comment cette nouvelle réforme affecte-t-elle les assureurs et les complémentaires santé et prévoyance ?

Dans le contexte d’un premier report de la mise en application de la réforme, AXECURA Consultants vous délivre son analyse.

 

Quelles sont les caractéristiques de la réforme sur la Protection Sociale Complémentaire ?

Historiquement, les actifs du secteur public sont libres de souscrire à une complémentaire santé sans que leur employeur ne participe aux frais, contrairement aux salariés du privé qui eux bénéficient d’une complémentaire santé prise en charge tout ou partie par l’employeur depuis la mise en application de l’ANI (accord national interprofessionnel), en 2016.

Par sa loi du 6 août 2019, complétée ensuite par l’ordonnance du 17 février 2021, le ministère de la transformation de la Fonction Publique entend combler ce vide. Désormais, l’employeur public sera lui aussi dans l’obligation de proposer une complémentaire santé collective avec un financement d’une partie des cotisations.

 

Une réforme qui va bouleverser la protection sociale des agents de la fonction Publique

Ce sont 5,6 millions d’actifs qui seront concernés par la réforme. Ils se divisent en 3 versants :

  • la Fonction Publique d’Etat
  • la Fonction Publique Territoriale,
  • la Fonction Publique Hospitalière.

La réforme s’appliquera à tous, sauf les retraités et les vacataires (agent recruté pour accomplir une tâche précise, ponctuelle et limitée à l’exécution d’actes déterminés et rémunéré à la tâche), exclus du dispositif obligatoire.

Cette réforme donnera aux agents publics la possibilité d’avoir notamment une plus grande couverture de frais relatifs à une maternité, une maladie ou un accident. Ils pourront également bénéficier d’accords collectifs pour leurs ayants droits.

Un calendrier progressif de mise en œuvre de la réforme PSC

 

 

Puisqu’il s’agit d’un chantier conséquent, le ministère a décidé de découper le projet de réforme en plusieurs jalons et de distinguer la prévoyance de la santé.

Pour rappel la prévoyance s’articule autour de l’accompagnement de l’assuré sur les aléas de la vie (accidents, obsèques, décès, hospitalisation et dépendance). La santé, elle, complète les remboursements de soins opérés par la Sécurité sociale (consultation médicale, achat de médicaments).

La Fonction Publique de l’Etat, avec ses 2,5 millions d’actifs, débute la transformation. Depuis un accord interministériel du 26 février 2022, un régime transitoire s’applique pour la Fonction Publique de l’Etat. Ce dernier vise à appliquer un remboursement partiel de l’assurance complémentaire, à hauteur de 15€/mois brut. Elle passera à 50% début 2024. D’autres textes sont attendus pour traiter de la prévoyance uniquement.

Pour la Fonction Publique Territoriale, les employeurs devront prendre en charge 20% minimum du montant de référence (35 €) en prévoyance dès le 1er janvier 2025. Sur la partie santé, une prise en charge partielle et obligatoire du montant de référence (30 €) sera effective pour le 1er janvier 2026.

Pour la Fonction Publique Hospitalière, c’est à partir du 1er janvier 2026, qu’une participation obligatoire en santé à hauteur de 50% minimum, entrera en vigueur.

Les groupes de travail et les syndicats proposeront plus tard un calendrier pour la réforme, avec une référence spécifique à la Fonction Publique Hospitalière qui manque actuellement de précisions.

Depuis l’annonce de la réforme, le calendrier a bien évolué. Plus récemment, en mai 2023, lors d’un comité de suivi sur l’accord du dispositif PSC, un report de 2024 à 2025 a été annoncé sur la généralisation de ce dispositif complémentaire santé. Nous nous attendons à voir une modification significative du calendrier de la réforme, dans les mois à venir.

 

Quels sont les impacts de la réforme de la protection Sociale complémentaire pour les acteurs de l’assurance et les mutuelles ?

Cette réforme suppose le passage d’un modèle de gestion individuelle à la gestion collective pour les acteurs historique de la protection du secteur publique. Cela implique un changement structurel important pour ces derniers.

Les impacts de la PSC sur l’offre mutualiste

La conception des futures offres et leur tarification constitueront un enjeu de taille pour les mutuelles historiques qui feront leurs premiers pas dans l’assurance collective.

En effet, les complémentaires du secteur public vont devoir concevoir des offres collectives pour répondre aux exigences de la loi mais également à la nature et aux besoins des fonctions publiques. Contraintes juridiques supplémentaires et nouvelle fiscalité s’ajouteront sur la table (durée, conditions d’éligibilité et d’adhésion, calcul de l’assiette des cotisations, formalisme…) comme spécifié lors de la dernière mise à jour des règles en matière de couverture, par l’arrêté du 30 mai 2022. L’offre de panier de soins devra également faire l’objet d’une adaptation en fonction des décisions prises pour chaque typologie d’acteurs de la Fonction Publique. Des garanties minimales sont prévues à travers notamment, la définition de forfaits imposés, selon une fourchette définie.

Les impacts de la PSC sur la distribution de la protection sociale

L’enjeu pour les mutuelles historiques de la fonction publique sera aussi de réorienter les réseaux de distribution dédiés à la vente aux particuliers tout en maintenant la proximité avec les clients. Ils devront développer un nouveau savoir-faire et de nouvelles compétences pour répondre aux futurs appels d’offres publics portant sur les besoins d’assurances collectives.

Les impacts RH de la réforme PSC

Les équipes commerciales devront être formées aux nouvelles pratiques. Les collaborateurs doivent eux aussi passer d’une approche individuelle à une approche collective. Certains d’entre eux devront notamment être formés à la réponse aux appels d’offres. Les points clés de réponses devront être étudiés, des tableaux de bord devront être créés et de nouveaux processus seront nécessaires.

Les impacts de la réforme PSC sur le SI des mutuelles

Les systèmes d’information des mutuelles historiques devront opérer une transformation majeure pour s’adapter à la gestion du collectif.

Une grande partie du Système d’information sera à adapter sur l’ensemble de la chaine de valeur assurantielle pour répondre aux exigences de l’assurance collective (tarification, paramétrage des offres, DSN, pilotage technique…) et à l’émergence de nouvelles activités à déployer (Vente et relation client Entreprise notamment).

Le premier corolaire de cette transformation des SI est le nécessaire accompagnement des collaborateurs dans cette bascule vers la gestion collective et les processus et outillages qui la soutiennent.

Dans ce cadre, plusieurs options s’offrent aux mutuelles historiques de la fonction publique entre investissements importants (outils, compétences…) ou partenariats voire rapprochements avec d’autres acteurs afin de mutualiser les moyens à déployer.

 

Des points de la réforme qui restent à définir

Cette période de transformation vers la gestion collective s’inscrit dans un contexte d’incertitudes, au sein duquel les complémentaires santé devront agir en anticipation. En effet :

  • Des négociations sont encore en cours sur le périmètre et les conditions d’éligibilité
  • Les conditions d’appel d’offres sont encore inconnues notamment sur la question du découpage des périmètres (géographie, statut, activités …)
  • Les conditions de dispense d’adhésion sont encore à l’étude
  • La durée des contrats est encore inconnue
  • La tarification sera dépendante du niveau de maille des contrats. Un suivi technique est à surveiller.

L’enjeu est d’anticiper étant donné que le cadre et les caractéristiques de la réforme ne sont pas totalement définis.

Dans l’attente de plus de détails, les complémentaires santé vont devoir préparer leur transformation et axer leurs travaux de réflexion sur la construction des nouvelles offres (cahier des charges), leur déploiement, leur communication et leur distribution.

L’incertitude n’aidant pas, comme le démontre ce premier report de la mise en application de la réforme, il est certain que seuls les acteurs qui auront engagé leurs réflexions suffisamment tôt seront capables de s’adapter aux nouvelles exigences et de présenter une offre crédible et solide aux ministères qui les consulteront à l’occasion de l’envoi des premiers appels d’offre.

AXECURA Consultants vous apporte son expertise afin d’établir une analyse d’impacts et un diagnostic des conséquences de cette nouvelle réglementation sur vos activités, de manière à vous aider à anticiper votre transformation et opérer les meilleurs choix.

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